JE M'ABONNE
octobre 2016

Concours Police - Témoignage de Sabine B

sabine«La restructuration de la police nationale a rendu très difficile l'obtention des concours de commissaires et d'officiers en externe (30 à 40 postes de commissaires par an et 50 à 60 d'officiers). Si vous voulez absolument travailler dans la police, la solution est de commencer par gardien de la paix, qui propose 4000 postes par an au concours.»

Comment a commencé votre carrière dans la police nationale ?

Je savais depuis l'âge de cinq ans que je voulais travailler dans la police. J'ai commencé comme gardien de la paix en 1986. Avec mon bac, j'aurais pu passer directement le concours d'officier, mais je ne l'ai pas souhaité. Par contre, dès le début, il était évident pour moi que j'allais passer le concours d'officier.

Comment s'est passé le concours de gardien de police nationale ?

Malgré mon bac B, je l'ai trouvé dur. Il y avait une dictée (plus de quatre fautes était éliminatoire), une dissertation et des maths très traditionnelles (des problèmes de trains qui se croisent, de clôtures pour un champ…) qui ne correspondaient pas à ce que j'avais appris au lycée.
La première fois, je l'ai passé sans préparer. J'avais 19 ans et je n'avais pas pris la peine de me renseigner, de m'entraîner. J'ai découvert les tests psychotechniques : des exercices de logique, de mémoire, des figures de face à reconnaître de profil, des formes pliées ou coupées… Je ne suis pas du tout rentrée dedans et j'ai raté le concours.

La fois suivante, vous avez davantage préparé le concours de police ?

J'ai acheté un livre sur les tests psychotechniques, je me suis entraînée et la fois suivante, je les ai réussis. Mais j'ai échoué sur la dictée et les maths. La fois d'après, j'ai préparé le français et les maths et j'ai fini pas avoir le concours !

Quel travail avez-vous fait au début de votre carrière ?

J'ai travaillé pendant quatre ans à Paris intra-muros, surtout en brigade de nuit, à assurer des missions de police-secours, de patrouille et d'accueil en commissariat.

Avez-vous apprécié ce travail de nuit ?

J'ai adoré le travail de nuit, même si je n'étais pas volontaire au départ. La nuit, c'est très particulier. La population, la délinquance, ne sont les mêmes que le jour. Il y a moins de hiérarchie donc moins de contraintes et plus de responsabilisation. Le corps doit s'adapter à ce rythme particulier. En interne, on appelle ceux qui font la nuit les « nuiteux ». On peut se consacrer à des missions plus spécifiques et intéressantes que le jour. Et cela permet d'avoir des journées pour soi puisqu'on se couche à 7h et qu'on se lève à 13h.

En 1989, vous avez passé le concours d'officier...

Au bout de quatre ans comme gardien de la paix, j'aurais pu passer le concoursinterne pour devenir officier. Mais comme j'ai été titularisée un 6 janvier et que la prise en compte des années de service se faisait au 1er janvier, j'aurais dû attendre un an de plus. J'ai donc passé le concours d'officier en externe.
Le concours était difficile. J'ai été dispensée des tests psychotechniques car on ne les passe qu'une seule fois. Nous avons eu une dissertation en quatre heures, une rédaction de note de synthèse en trois heures, une matière à option (l'histoire pour moi) portant sur le programme de la seconde à la terminale. A l'oral, j'ai été interrogée sur de la culture générale et une autre matière à option (droit constitutionnel, pénal ou administratif, procédure pénale…). Les épreuves de sport sont les mêmes que pour le concours police nationale.

Où avez-vous été nommée une fois officier ?

J'ai été affectée à Savigny-sur-Orge en banlieue parisienne pendant six ans, dans une unité de police judiciaire et administrative. Nous enquêtions de la simple plainte pour tentative de vol dans un véhicule au viol et au crime.

En 1995, vous êtes devenue lieutenant de police.

Avant 1995, il y avait d'un côté les inspecteurs de police en civil, de l'autre les officiers de paix en tenue, appelés lieutenants. Il y avait deux concours différents mais portant sur les mêmes matières. On ne pouvait pas basculer de l'autre côté pendant toute sa carrière. Une réforme de la police nationale est intervenue en 1995 et a permis de rassembler les deux corps en un seul. Je suis donc devenue lieutenant de police en 1995. En 1997, j'ai été promue capitaine, avec le commandement d'unités de nuit dans l'Essonne traitant du judiciaire, de la voie publique et de l'ordre public. Une mission totalement polyvalente avec une habilitation sur tout le département. J'ai fait cela pendant cinq ans. Ensuite, j'ai pu être mutée dans ma région d'origine à Toulouse.

Vous êtes désormais responsable du Centre de Formation de la Police nationale (CFP). Pouvez-vous nous présenter l'école ?

L'Ecole assure deux missions : la formation initiale au sein du Centre de Formation de la Police nationale (CFP) dont je m'occupe, et la formation continue, au sein de l'Ecole Nationale Supérieure d'Application de la Police Nationale, pour les policiers qui préparent des grades supérieurs. La formation initiale accueille 130 élèves. La formation continue reçoit 80 à 100 stagiaires pour des durées de 2 semaines en moyenne.

Quel est le profil des élèves gardiens de la paix ?

Ils sont en majorité surdiplômés par rapport à ce qu'on leur demande. Ils ont surtout des bac+2 ou 3, mais parfois jusqu'à bac+5.
La restructuration de la police nationale a rendu très difficile l'obtention des concours de commissaires et d'officiers en externe (30 à 40 postes de commissaires par an et 50 à 60 d'officiers). Si vous voulez absolument travailler dans la police, la solution est de commencer par gardien de la paix, qui propose 4000 postes par an au concours.
La plupart des élèves ont une haute idée de leur métier et sont très motivés. Il faut vraiment qu'ils le soient car à l'école, ils doivent marcher au pas, en tenue, avec un encadrement militaire, en gagnant 1200 à 1300€ net et partir en région parisienne à l'issue de leur formation (dans 80% des cas). J'ai deux à trois démissions d'élèves sur 100 chaque année.
Nous avons 30% de femmes, à cause du nombre de lits à l'internat. L'internat n'est pas obligatoire mais il est gratuit. Nous incorporons nos élèves deux fois par an à Toulouse, mais en France c'est quatre fois, en décembre, février, mai et septembre.

Avez-vous un programme pour favoriser la diversité du recrutement ?

Le programme « cadets » fait partie du plan « Egalité des chances » lancé en 1999-2000. Il s'agissait au départ de partenariats entre les écoles de police et les lycées pour préparer les lycéens en difficulté (sociale, familiale ou scolaire) au concours de gardien de la paix. Il y a 3 ou 4 ans, le gouvernement a souhaité se servir de ce programme pour sélectionner des jeunes et les aider à rentrer dans la police en leur faisant passer le concours d'adjoint de sécurité (ADS). On signe à nos « ADS cadets » un contrat de cinq ans. Au lieu de les envoyer sur le terrain après 3 mois de formation, on les forme pendant un an et on les prépare au concours de gardien de police nationale en interne. Ils passent 28 semaines à l'école de police et 12 semaines au lycée. Certains bacheliers pros passent le concours police nationale en externe.
Sur 30 cadets formés à Toulouse l'an dernier, 7 ont eu le concours. Ceux qui ne l'ont pas continuent à travailler comme ADS et ont quatre ans pour repasser le concours police nationale (par leurs propres moyens cette fois). 1000 cadets sont formés par en France.